samedi 13 février 2016

Grossir le ciel de Franck Bouysse

 Un auteur que je découvre avec bonheur ! Né à Brive en 1965, enseignant en biologie à Limoges, c'est sa passion pour le roman noir qui l'incite à devenir écrivain. Il publie, entre autres, son 1er roman noir L'Entomologiste aux éditions Le Manuscrit en 2007.
    "Grossir le ciel", commence comme un roman du terroir, puis insidieusement l'atmosphère devient pesante, l'intrigue inquiétante  et sombre comme les nuits agrippant le lecteur pour ne plus le lâcher.
    Les Cévennes, une terre sévère, sauvage, une terre endormie qui végète sous son manteau neigeux mais se réveille la nuit. Des personnages à l'image du pays qui les a façonnés solitaires, taiseux en lutte perpétuelle contre une nature hostile aux hivers trop froids et aux étés trop chauds.

    "Un lieu-dit appelé Les Doges, avec deux fermes éloignées de quelques centaines de mètres, de grands espaces, des montagnes, des forêts, quelques prairies, de la neige une partie de l'année, et de la roche pour poser le tout. Il y avait aussi les couleurs qui disaient les saisons, des animaux, et puis des humains, qui tour à tour espéraient et désespéraient, comme des enfants battant le fer de leurs rêves, avec la même révolte enchâssée dans le coeur, les mêmes luttes à mener, qui font les victoires éphémères et les défaites éternelles."

    Aux Doges, Abel et Gus sont en quelque sorte des survivants. Abel, le plus âgé est veuf depuis de nombreuses années et Gus est toujours resté célibataire. Levé avant l'aube, chaque matin il continue de maintenir sa ferme en activité luttant contre une terre plus favorable à la pauvreté qu'au rendement. Voisins s'entraidant quand les circonstances l'exigent, leurs rencontres restent exceptionnelles et leurs propos anodins. Deux taiseux qui éludent les confidences, retiennent les mots qui ne disent pas toujours ce qu'ils semblent vouloir dire et cachent leur vérité sous une apparente banalité. Une solitude propice à l'observation où le moindre détail inhabituel peut être remarqué dans une routine imposée par ce "désert rural".
    L'abbé Pierre disparaît, Abel change, des événements insolites se produisent, des inconnus débarquent aux Doges, insistent et perturbent Gus qui cherche à comprendre.
   Le suspense est imparable, diaboliquement géré et crédible parce que directement ancré dans ce pays  qui impose ses codes aux hommes qui n'ont pas trop le choix. Des hommes que l'auteur rend plus vrais que nature en analysant au  plus près l'évolution de leur comportement face à des événements qu'ils ne peuvent maîtriser.
    Un beau roman "noir", hymne à la nature, aux hommes, à l'héritage ancestral, et une manière discrète de mettre en doute un changement mal compris.

    Edition : La Manufacture de livres 2014 (199pages-16,90€)


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Josèphe