dimanche 17 décembre 2017

Le camp des autres de Thomas Vinau

   "Je l'ai gardée au chaud cette histoire qui poussait, qui grimpait en noeuds de ronces dans mon ventre en reliant, sans que j'y pense, mes rêves les plus sauvages venus de l'enfance et le muscle de mon indignation. Alors j'ai voulu écrire la ruade, le refus, le recours aux forêts."

    Gaspard est en fuite. Parce qu'il a commis l'irréparable, il court se réfugier au profond de la forêt : "cette enflure de père, barrique de merde" a failli le tuer ainsi que son chien qui essayait de le défendre et qu'il a sérieusement blessé. Il porte l'animal, marchant vers la clandestinité loin des hommes et de leur jugement. Mais la forêt a ses lois et n'est pas toujours le refuge qu'un enfant peut attendre. Il y trouvera pourtant un monde parallèle, celui des exclus, des laissez pour compte qui n'hésitent pas à l'accueillir dans leur "camp" : Jean-Le-Blanc chasseur, braconnier, sorcier ou simple herboriste ? Sarah  la prostituée, Fata', Capello et leur communauté de gitans.

    Un conte bien dans l'air du temps que l'auteur appuie sur un fait historique : en 1907, les Brigades du Tigre crées par Clémenceau arrêtent une bande de pillards, la Caravane à Pépère, qui sévissaient sous la bannière de Capello terrorisant et pillant les populations. Coup d'épée dans dans l'eau que cette arrestation qui se soldera, deux mois plus tard, par de simples condamnations pour de maigres larcins commis par une bande de "bras cassés" pas très dangereux.

    Un texte lumineux, poétique, humain qui donne à la forêt le rôle d'un personnage à part entière. Une écriture rapide faite de chapitres courts, très courts parfois, qui vivifient le récit.
    Heureuse découverte d'un auteur qui déploie avec la même dextérité humanité et poésie !

    Alma, éditeur. Paris, 2017. (195 pages-17€)