lundi 11 mars 2013

Profanes de Jeanne Benameur

"Aujourd'hui je me donne droit au doute.
Un profane aussi a le droit de douter. Le doute n'est pas réservé aux croyants." 

    C'est ce que pense Octave Lassalle, chirurgien à la retraite. Que peut-il encore espérer d'une vie brisée par la mort de sa fille qui s'est tuée dans un accident de voiture et qu'il n'a pu sauver, paralysé par l'impossibilité d'intervenir. Anne, sa femme, c'est dans "la religion, ses rituels et ses mystères ordonnés [qu']elle a cherché la paix." Une paix qui s'est refusée et l'a incitée à fuir au Canada "avec leur enfant lovée dans son ventre pour toujours".
    Maintenant âgé de quatre-vingt-dix ans et en prévision d'un état qui ne peut que se dégrader, il décide de recruter quatre personnes pour l'aider à vivre les dernières années qui lui restent. Il a avec chaque postulant un minutieux entretien. Et c'est ainsi qu'il engage un homme et trois femmes.
   Dans cette superbe maison entourée d'un jardin aux essences rares, ces "accompagnants" se succéderont jour et nuit afin de remplir une tâche bien spécifique. Le maître de maison leur a réservé le deuxième étage où chacun a pu se choisir une chambre pour en disposer selon son bon plaisir.
    La maison devient le décor où chaque personnage doit trouver sa place et tenir son rôle dans un huis-clos bien monté mais un peu cousu de fil blanc. Des personnages qui arrivent chargés, les uns d'un passé lourd à porter, les autres d'un avenir difficile à assumer. Tous les quatre, à l'image de celui qui les a choisis, des êtres dans le doute en quête de réponses aux questions existentielles, à un moment de leur vie où tout peut encore changer.

    Parce que Jeanne Benameur est une auteure avertie qui sait donner vie et consistance à ses personnages, ménager ses effets pour soutenir jusqu'au bout l'intérêt du lecteur, parce que c'est une "belle" histoire brillamment contée, j'ai lu avec plaisir ce roman. Mais le livre refermé, j'ai réalisé, que comme le "profane", j'étais restée à la porte du temple ! J'ai relu des passages et j'ai compris qu'il m'était difficile d'adhérer à ce récit dénué de réalisme et de vraisemblance et d'accepter les conditions improbables et totalement fabriquées du déroulement de l'intrigue. Les phrases brèves qui rythment l'écriture et portent le lecteur vers une irrépressible envie d'avancer privent le discours d'une fluidité qui retire aux émotions toute velléité de passer la barrière des mots.
    Oubliez mes réserves !
     Ce livre, par les questions essentielles qu'il pose, mérite que l'on s'y arrête.

    Actes Sud 2013 (274 pages)

    Jeanne Benamaur : est née en 1952 en Algérie d'un père arabe et d'une mère italienne. Elle arrive à La Rochelle à l'âge de 5ans. Elle fait des études de lettres à Poitiers et enseigne en milieu rural. En 2000, elle se consacre à l'écriture.
   Quelques livres :
  • 2000 Les Demeurées (Denoël- Folio)
  • 2008 Laver les ombres (Actes Sud)
  • 2011 Les Insurrections singulières (Actes Sud)
  • 2013 Profanes (Actes Sud)
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