mardi 29 mars 2016

Ma d'Hubert Haddad




   Au Japon, la marche solitaire du poète vagabond en quête du détachement et de la sérénité qui le mèneront au bout de son chemin.

    "Depuis bien des années, je marche pour ne pas mourir, d'un bout à l'autre de Honshu et dans les autres îles, celles où on ne risque pas de rattraper la queue de son ombre après un jour ou deux. Ma mémoire est mon seul fardeau, le plus lourd en tout cas, pesant comme un cadavre de femme. Un jour à venir, dans la montagne aux cigales, l'oubli me gratifiera de ses doux bûchers  de lucioles où tout ce que l'on croyait aimer s'efface en cendres bleues avec la nuit montante. On pourrait croire que je cours après mon passé mais c'est bien pire. Je me souviens du dernier soir comme si c'était demain.

    Shoichi l'étudiant narrateur avait le regard étonné des myopes qui portent des verres "larges comme des soucoupes." Saori l'universitaire l'avait remarqué au Café Crépuscule où il servait le dimanche. Admirative du poète Santoka Shoichi Taneda dont elle venait de terminer la biographie, elle fût frappée par la similitude de leur allure et de leur prénom. Elle fit les premiers pas, leur aventure fût intense mais de courte durée, Saori s'était noyée peu de temps après leur rencontre. Inconsolable, Shoichi décide de quitter Tokyo et de partir sur les traces du poète Taneda, auteur de haïkus et buveur de saké : "Le saké pour le corps, le haïku pour le coeur." Dans ses bagages le manuscrit de la biographie du poète que Saori lui avait confié.

    Deux destinés à un demi-siècle d'intervalle qui s'imbriquent et se confondent, Shoichi s'identifiant au poète disparu. Deux parcours dans le décor changeant d'un Japon aux multiples facettes. Et toujours cette prose poétique de l'auteur émaillée, ici, des haïkus des maîtres Basho et Santora. Une prose qui auréole les descriptions d'une délicate beauté qu'il nous parle de la nature, de la lumière ou du monde des vivants, de leurs souffrances et de leur naufrage. Un dépaysement total pour le lecteur !

    "Si les saisons et les jours sont les enfants du temps, chaque instant est un temple."

    Editions Zulma 2015 (247 pages-18€)


    



                                         

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Josèphe